Clause de tontine

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Tontine

La clause de tontine insérée à l'acte d'achat d'un bien est un moyen de transmettre du patrimoine à des tiers non-héritiers.

Pour modifier la dévolution légale du patrimoine par succession, il est possible de prévoir un testament ou une donation.

Certaines clauses contractuelles permettent, lors d'opérations isolées, de transmettre un bien à un bénéficiaire de son choix : c'est le cas de la clause de tontine.

Tontine et succession : un cadre légal

La clause de tontine, insérée à l'acte d'achat, suppose l'acquisition d'un bien, meuble ou immeuble, par plusieurs personnes.

Le bien acquis en tontine appartient au dernier survivant : la part du bien du défunt est transmise aux acquéreurs survivants, jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un acquéreur survivant, qui conserve seul la propriété du bien, comme s'il en avait toujours été le seul propriétaire.

En tant que contrat « aléatoire », l'achat en tontine doit respecter les conditions de l'aléa. Les acquéreurs doivent :

  • tous financer une partie du bien ;
  • avoir une espérance de vie similaire.

À défaut, l'achat en tontine peut être requalifié en donation à un tiers.

Clause de tontine et succession : le dernier survivant

Le dernier acquéreur survivant est considéré comme avoir toujours été seul propriétaire du bien.

L'acquéreur défunt est considéré comme n'avoir jamais été propriétaire du bien : le bien acquis en tontine ne fait pas partie du patrimoine de l'acquéreur défunt.

Au jour de son décès :

La clause de tontine a donc une conséquence juridique importante : le bien est censé n'avoir jamais fait partie du patrimoine du défunt. Il n'y a pas transmission entre le défunt et le survivant : cela signifie concrètement que le bien échappe aux règles de la réserve héréditaire et des libéralités, car il ne fait pas partie de la succession du défunt. Dès lors, la clause de tontine permet de transmettre un bien au-delà de la quotité disponible.

La clause de tontine permet d'assurer l'avenir du conjoint survivant, ainsi que la protection des personnes non mariées (concubins, pacsés).

Attention : en présence d'enfants nés d'une première union, les héritiers qui se considèrent lésés par ce montage juridique peuvent engager une action en justice, et prouver que le pacte tontinier a été conclu dans le seul but de les priver de leur réserve héréditaire.

Exemple de tontine en cas de succession

X a 1 enfant.

Il achète avec Y un tableau d'une valeur de 2 000 € en tontine (la clause de tontine implique que le bien meuble appartient à l'acquéreur survivant).

X décède. Le tableau est réputé appartenir à Y, acquéreur survivant ; il ne fait donc pas partie de la succession. X laisse pour seul patrimoine un bateau d'une valeur de 11 000 €.

L'enfant (unique héritier) a vocation à hériter des 11 000 € ; Y récupère le tableau en pleine propriété.

Si le tableau avait été acquis pour moitié par X et pour moitié par Y sans clause de tontine, la part du tableau appartenant à X aurait fait partie de la succession : l'enfant aurait hérité de 11 000 € + (2 000 € / 2) = 12 000 €, ou du minimum de sa réserve héréditaire de 0,5 × (11 000 € + 1 000 €) = 6 000 € (dans l'hypothèse où X a gratifié un tiers à la succession par testament ou donation).

Attention : même si le bien ne fait pas partie de la succession du défunt, l'acquéreur survivant est soumis au paiement de droits de succession sur ce bien, en fonction de son degré de parenté avec le défunt.

Clause de tontine : une fiscalité avantageuse?

Le pacte tontinier est assimilé juridiquement à un contrat conclu à titre onéreux. Selon cette qualification, les parts transmises au survivant devraient être soumises aux droits de mutation à titre onéreux, et non aux droits de succession (droits de mutation à titre gratuit, plus onéreux).

Mais fiscalement, la qualification est toute différente : pour éviter les fraudes et autres abus, l'administration a soumis la tontine aux règles fiscales des successions. Cela veut dire que, bien que le bien ne fasse pas juridiquement partie de la succession du défunt, le survivant doit payer des droits sur la part recueillie, calculés selon le degré de parenté et la valeur de la part. Ces droits de mutation à titre gratuit sont perçus à chaque décès.

Bon à savoir : la clause de tontine peut toutefois présenter un intérêt fiscal quand le bien constitue la résidence principale des personnes concernées au moment du décès. Dans ce cas précis, et sous la condition que la valeur du bien transmis ne dépasse pas la valeur de 76 000 €, le survivant ne paie que les droits de mutation à titre onéreux.

Cette possibilité de bénéficier d'un aménagement fiscal intéressant ne concerne que les clauses tontinières insérées dans les contrats d'acquisition en commun (le plus souvent par des concubins). Les notaires vont plus loin dans leur raisonnement, et conseillent en pratique d'insérer la clause de tontine dans les statuts d'une société civile immobilière (SCI) qui possède elle-même le bien concerné. Au décès de l'un des acquéreurs, le survivant récupère donc la quasi-totalité des parts en payant seulement les droits de mutation à titre onéreux prévus pour les titres de SCI (environ 5 %). Attention toutefois à ce que l'administration fiscale ne requalifie pas ce montage, considérant qu'il s'agit d'un abus de droit, la SCI n'ayant été constituée que dans le but de contourner la règle fiscale.

Important : avant le 1er janvier 2021, seuls les actes fictifs, ou qui avaient pour objectif exclusif d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales pouvaient être poursuivis dans le cadre d'une procédure pour abus de droit (article L. 64 du Livre des procédures fiscales). Depuis le 1er janvier 2021, pour les actes passés à partir du 1er janvier 2020, la notion d’abus de droit vise aussi les actes à but principalement fiscal (article L. 64 A du Livre des procédures fiscales).

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