Il est possible, de son vivant, de prévoir une donation afin d'avantager un héritier ou un tiers à sa succession, en lui transmettant tout ou partie de son patrimoine.
Il existe différents types de donation :
- donation entre époux : donation au dernier vivant ;
- donation partage, donation partage transgénérationnelle ;
- démembrement de propriété : donation usufruit et nue-propriété ;
- donation graduelle et donation sous conditions ;
- donation résiduelle, donation actions, donation déguisée.
Le donateur peut gratifier un héritier en se réservant l'usufruit du bien : il donne alors la nue-propriété (donation avec réserve d'usufruit). Il peut également décider de donner l'usufruit d'un bien (donation d'usufruit).
Donation avec réserve d'usufruit
Donation avec réserve d'usufruit : qu'est-ce que c'est ?
Opérer un démembrement de propriété sur un bien matériel ou une somme d'argent, c'est diviser juridiquement le bien en deux parties : l'usufruit et la nue-propriété.
Une donation peut porter uniquement sur la nue-propriété :
- le donateur conserve l'usufruit du bien : il a les droits d'usage et de perception des fruits (habitation d'un logement, perception des revenus locatifs ou des intérêts d'un argent placé, récolte d'un terrain agricole, etc.) ;
- le bénéficiaire acquiert la nue-propriété du bien : il a les pouvoirs de gestion et de disposition sur le bien, pouvoirs qu'il partage avec le donateur (le bénéficiaire ne peut vendre le bien sans l'accord du donateur, et inversement). Le bénéficiaire acquiert la pleine propriété du bien du seul fait du décès du donateur.
La donation avec démembrement de propriété est particulièrement adaptée lorsque le donateur consent la donation alors qu'il est encore jeune, et que son patrimoine peu important ne lui permet pas de se séparer totalement du bien.
Ce type de donation peut être consenti lors d'une donation-partage ou pour la création d'une société civile immobilière (SCI).
Comment donner ?
De son vivant, le donateur peut consentir :
- une donation simple : il s'agit de l'acte par lequel le donateur transmet de façon irrévocable et immédiate un bien en faveur du donataire qui l’accepte ;
- une donation-partage : il s'agit de l'acte qui permet à une personne de partager avant son décès tout ou partie de son patrimoine entre ses héritiers.
Dans ces deux cas, un acte notarié doit obligatoirement être dressé, car les consentements tant du donateur que des donataires sont requis.
Bon à savoir : un acte notarié n'est pas nécessaire pour un don manuel qui ne porte que sur des sommes d’argent ou ne concerne que des biens corporels (des bijoux de famille par exemple). Le don manuel doit néanmoins être déclaré. Depuis le 30 juin 2021, le site Impots.gouv.fr permet de déclarer les dons manuels en ligne. Le service calcule automatiquement les droits dus par le donataire.
Que peut-on donner?
La donation peut porter sur tout types de biens, qu'il s'agisse d'un immeuble, d'un bijou, ou encore de sommes d'argent.
Dès lors, le donateur peut transférer :
- tout ou partie de la pleine propriété de son bien ;
- ou l’usufruit de son bien : c'est-à-dire le droit de jouir du bien en l’habitant ou en le louant (dans ce cas, le donateur se réserve la nue-propriété du bien) ;
- ou la nue-propriété de son bien : dans ce cas, le donateur se réserve l'usufruit.
Bon à savoir : la donation avec réserve d'usufruit consiste pour le donateur à donner son bien, en conservant le droit de l’utiliser (d’y habiter ou de le louer) et d’en percevoir les fruits (les loyers). L’intérêt des donations avec réserve d’usufruit est de permettre d’anticiper une succession future tout en conservant, pour le donateur, l’usage des biens donnés. Elles permettent aussi de réduire les droits fiscaux.
À noter : la donation avec réserve d’usufruit du logement familial appartenant en propre à un époux, et réalisée par lui, n’est pas considérée comme nulle en l’absence de consentement de l’autre époux dès lors que cette donation n’a pas porté atteinte à l’usage et à la jouissance du logement familial pendant le mariage (Cass. 1re civ., 22 mai 2019, n° 18-16.666).
Donation avec réserve d'usufruit : des droits de donation uniquement
L'intérêt de cette opération est essentiellement fiscal. Le bénéficiaire n'est assujetti qu'aux droits de donation, bénéficiant des abattements correspondants. Il n'est pas soumis aux droits de succession lors du transfert de la pleine propriété au décès du donateur.
Le montant des droits de donation et des abattements est calculé en fonction de la valeur de la nue-propriété et de l'âge du donateur : plus le donateur est jeune, plus la valeur de la nue-propriété est faible, moins les droits de donation sont élevés.
Il est plus avantageux de consentir la donation le plus tôt possible. Quel que soit l'âge du donateur, la donation avec réserve d'usufruit est néanmoins plus avantageuse que la donation en pleine propriété.
Voici un tableau de la valeur de la nue-propriété selon l'âge du donateur :
Âge du donateur | Valeur de la nue-propriété |
---|---|
21 ans et moins | 10,00 % de la valeur totale du bien. |
31 ans et moins | 20,00 % de la valeur totale du bien |
41 ans et moins | 30,00 % de la valeur totale du bien. |
51 ans et moins | 40,00 % de la valeur totale du bien. |
61 ans et moins | 50,00 % de la valeur totale du bien. |
71 ans et moins | 60,00 % de la valeur totale du bien. |
81 ans et moins | 70,00 % de la valeur totale du bien. |
91 ans et moins | 80,00 % de la valeur totale du bien. |
92 ans et plus | 90,00 % de la valeur totale du bien. |
Exemple de donation en usufruit : X a 60 ans : il consent une donation avec réserve d'usufruit d'un immeuble d'une valeur de 200 000 € à son enfant. La valeur de la nue-propriété est de 50 %, soit 100 000 €. Or X bénéficie de l'abattement parent/enfant à hauteur de 160 000 €. L'enfant bénéficiaire ne paie donc pas de droits de donation. Si X donne dans les mêmes conditions à l'âge de 92 ans, la valeur de la nue-propriété est de 180 000 €, l'enfant est donc tenu au paiement de droits de donation sur 20 000 €.
Donation avec réserve d'usufruit : le rapport à la succession
Au décès du donateur usufruitier, l’usufruit donné s’éteint : cela signifie concrètement que le donataire est investi de la pleine propriété de l’immeuble.
Le type de la donation : avance de part successorale ou hors part successorale
- Au décès du donateur usufruitier, la donation en avance de part successorale est rapportée à la succession. La donation en avance de part successorale a pour finalité de faire à un héritier une avance sur sa part d’héritage, sans pour cela porter atteinte à l’égalité entre tous les héritiers.
- Faite hors part successorale, la donation est un moyen d'avantager un héritier par rapport à un autre. Dans ce cas, la donation s'ajoute à la part de cet héritier gratifié, sans pouvoir excéder le montant de la quotité disponible. Il faut ici retenir qu'une telle donation n'est pas rapportable à la succession du donateur usufruitier, mais qu'elle pourra toutefois être réduite si elle est excessive (en cas de dépassement de la quotité disponible).
La valeur à prendre en compte lors du partage successoral
En principe, le donataire, bénéficiaire du démembrement de propriété, devrait rapporter à la succession la valeur reçue de la nue-propriété du bien.
Cependant, la Cour de cassation a jugé en 2011 que, lors du partage successoral, la valeur à prendre en compte pour une donation en nue-propriété avec réserve d'usufruit au profit du donateur « est celle de la pleine propriété du bien objet de ladite donation ».
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Donation d'usufruit
Donation d'usufruit : qu'est-ce que c'est ?
À l'inverse de la donation avec réserve d'usufruit, le donateur peut décider de ne donner que l'usufruit d'un bien de son patrimoine. Dans ce cas, il se libère de la gestion de ce bien, et permet au donataire gratifié de l'utiliser et/ou d'en percevoir les revenus.
Comme pour tous les autres types de donation, il y a des règles à respecter, et la principale est que le donateur doit être animé d'une véritable intention de donner.
Bon à savoir : le nu-propriétaire, donateur à l'acte, conserve la disposition du bien donné. En effet, le donataire gratifié ne peut pas le vendre ou le donner sans l'autorisation expresse du nu-propriétaire.
Une limite de temps possible
La donation de l'usufruit peut être temporaire : cela signifie concrètement que le donateur peut récupérer la pleine propriété du bien donné en usufruit au terme prévu dans l'acte de donation.
Les avantages de cette opération sont intéressants :
- le donataire gratifié dispose ainsi de revenus complémentaires, lesquels peuvent se substituer au paiement d'une pension alimentaire (dont la déduction est, elle, plafonnée) ;
- le donateur de l'usufruit n'est plus soumis à l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) sur la valeur du bien donné ;
- si pour sa part le donataire gratifié n'est pas soumis au paiement de l'IFI, alors le bien donné n'est plus imposable à cet impôt immobilier.
Bon à savoir : en cas de donation au profit d'un enfant du donateur, l'administration fiscale peut mettre en œuvre une procédure de répression des abus de droit. L'intention du donateur doit donc être parfaitement claire : son objectif ne doit pas être uniquement fiscal, et il doit pouvoir justifier de vouloir subvenir aux besoins de son descendant.
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La fiscalité
Le donataire gratifié de l'usufruit temporaire doit s'acquitter des droits d'enregistrement ou de mutation à titre gratuit sur la valeur de la donation.
La valeur de la donation d'usufruit est déterminée par un pourcentage de la pleine propriété qui dépend, non pas de l'âge de l'usufruitier (comme dans l'usufruit viager), mais de la durée du démembrement.
Exemple : la valeur fiscale de l'usufruit temporaire est fixée à 23 % de la pleine propriété par période de 10 ans : 23 % de 0 à 10 ans ; 46 % de 11 à 20 ans ; 69 % de 21 à 30 ans, dans la limite de la valeur fiscale de l'usufruit viager.