L'envoi en possession constitue l'ensemble des formalités que certains successeurs doivent effectuer afin d'entrer en possession de ce qui leur revient.
Cette démarche doit être accomplie par le légataire universel institué par testament olographe ou mystique en l'absence d'héritiers réservataires ou, à défaut de successeur saisi ou d'héritier, par l’État.
La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a réformé l'envoi en possession du légataire universel. Nous faisons le point.
Envoi en possession des légataires universels
L'envoi en possession avant le 1er novembre 2017
Le légataire universel devait se faire connaître et adresser, au président du tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance) du ressort du lieu d'ouverture de la succession, une requête jointe à l'acte de dépôt du testament :
- Le légataire universel est celui qui est voué à recevoir la totalité de la succession du défunt grâce à un testament préparé du vivant du disposant.
- Les légataires particuliers ou à titre universel ne sont donc pas concernés par cette démarche. Ces derniers doivent demander la délivrance du legs.
Au vu de la complexité des formalités à accomplir, le recours à un avocat était indispensable.
Avant de demander l'envoi en possession, le légataire universel devait s'assurer de deux choses (article 1008 du Code civil) :
- que le legs résulte d'un testament rédigé en la forme mystique ou olographe ;
- l'absence d'héritier réservataire.
Bon à savoir : le testament rédigé en la forme mystique est rédigé par le disposant, il est tenu secret et est cacheté chez un notaire. Les critères sont précisés à l'article 976 du Code civil. Le testament olographe est rédigé, daté et signé de la main du disposant. Il est défini à l'article 970 du Code civil.
Si ces deux conditions étaient respectées, le légataire universel pouvait envoyer sa demande d'envoi en possession. Il s'agissait pour l'autorité judiciaire d'effectuer un contrôle de la validité du legs du disposant ayant rédigé un testament en faveur du légataire.
Le temps des opérations de contrôle ou des actions contentieuses, le président du tribunal judiciaire avait la possibilité d'ordonner la réalisation d'un inventaire des biens, l'apposition de scellés et la mise sous séquestre des biens.
Des mesures de protection du légataire pouvaient également intervenir.
Après vérification de la validité du legs, le président du tribunal judiciaire rendait une ordonnance d'envoi en possession, ce qui permettait au légataire de recueillir les biens de la succession.
Depuis le 1er novembre 2017
La loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a abrogé l'article 1008 du Code civil : la longue et coûteuse procédure d'envoi en possession du légataire universel par le juge a été supprimée.
Désormais, en l'absence d'héritiers réservataires, le légataire universel institué par testament olographe ou mystique n'est plus automatiquement envoyé en possession.
C'est le notaire qui vérifie « les conditions de la saisine du légataire au regard du caractère universel de sa vocation et de l'absence d'héritiers réservataires. Il port(e) mention de ces vérifications sur le procès-verbal » (article 1007 du Code civil).
Dans le mois qui suit le procès-verbal d'ouverture du testament, le notaire adresse une copie authentique de celui-ci et une copie figurée du testament au greffier du tribunal judiciaire du lieu d'ouverture de la succession. Il assure une publicité au Bodacc et sur un support habilité à recevoir des annonces légales (publication de presse ou service de presse en ligne).
Important : cependant, la procédure n'est pas totalement déjudiciarisée : en cas de contestation par tout intéressé, le légataire devra se faire envoyer en possession par le juge (article 1378-2 du Code de procédure civile issu du décret n° 2016-1907 du 28 décembre 2016).
Envoi en possession de l’État
En l'absence de légataire ou d'héritier, ou lorsque la succession est abandonnée (selon l'article 539 du Code civil), l’État devient de fait celui qui recueillera la succession. On dit dans ce cas qu'il y a déshérence.
Il est également soumis aux démarches d'envoi en possession afin d'accéder à la succession. Selon l'article 811-1 du Code civil, un inventaire doit être dressé. En revanche, l’État n'est pas contraint de régler au-delà de l'actif de la succession. Il ne paie que ce que lui permet d'honorer la valeur des biens.
Grâce à l'envoi en possession, l'État obtient la saisine, à l'instar des successibles ordinaires. La procédure est décrite au premier alinéa de l'article 1354 du Code de procédure civile.
Bon à savoir : même en l'absence d'envoi en possession de l’État, ce dernier est réputé propriétaire des biens non réclamés d'une succession.
L'État est représenté par l'Administration des Domaines lors des démarches d'envoi en possession.
À noter : si un héritier se manifeste, même tardivement, et accepte la succession, la déshérence prend fin. Ce qui fait de l’État un successible non définitif.
Pour aller plus loin :