Contester une succession

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Homme de loi qui signe un contrat Getty Images / djedzura

Le décès d'une personne peut être source de conflits entre ses héritiers, ou entre ces derniers et les légataires : il arrive notamment que la volonté du défunt soit contestée, voire niée. Plusieurs causes de conflits existent, et il y a autant de types de litiges que de successions.

Vous avez la possibilité de montrer votre désaccord au moment du décès en vous fondant sur plusieurs motifs permis par la loi. Voici les démarches à suivre pour contester une succession.

1. Défendez vos droits en cas de recel successoral

Vous pouvez vous défendre contre les manœuvres dolosives qui entachent le bon règlement de la succession du défunt. Le recel successoral est une fraude contre laquelle vous pouvez agir.

Invoquez le recel successoral

La loi vous permet d'invoquer le recel successoral si vous apportez la preuve qu'une personne a tenté de dissimuler volontairement l'existence d'un héritier ou de détourner une partie du patrimoine du défunt à son profit.

En pratique, il vous appartient d'apporter la preuve que cet héritier de mauvaise foi :

  • a dissimulé ou détruit un testament olographe non enregistré ;
  • a rédigé un faux testament en sa faveur, en imitant par exemple l'écriture et la signature du défunt ;
  • a dissimulé une donation ;
  • a subtilisé du mobilier ou de l'argent…

Agissez en justice

Si vous avez réussi à apporter la preuve des manœuvres frauduleuses exercées par un héritier, vous devez agir en justice pour faire constater et sanctionner le recel de succession.

Le tribunal judiciaire (ex-tribunal de grande instance), sur requête de votre avocat, prend des mesures conservatoires pour protéger les biens dépendant de la succession du défunt, et prévenir une autre captation.

Bon à savoir : cette protection par le juge peut aller jusqu'à l'apposition de scellés.

Un inventaire est par ailleurs demandé par le juge.

Le recel successoral est puni par l'article 778 du Code civil :

  • Son auteur peut être condamné à verser des dommages-intérêts.
  • Le juge prononcera une sanction civile ; le recel n'est pas sanctionné pénalement.

2. Faites requalifier les dernières volontés du défunt

Lors de l'ouverture de la succession du défunt, la lecture d'un legs ou la prise de connaissance des charges et conditions d'une donation peuvent faire l'objet d'interrogations, voire de doutes, de la part des héritiers dont vous faites partie.

Si vous estimez que le défunt n'avait pas sa pleine capacité au moment de la rédaction de l'acte, ou si vous doutez des termes des dispositions prises, vous pouvez agir.

Contestez l'interprétation des dernières volontés du défunt

Vous avez la possibilité d'apporter la preuve que les actes effectués de son vivant par le défunt peuvent être interprétés différemment au moment de son décès.

En pratique, les héritiers se heurtent souvent en ce qui concerne la qualification d'une remise de somme d'argent : prêt ou donation ?

Ainsi, déterminer la nature réelle d'un acte et la volonté de l'auteur de la donation ou du legs n'est pas toujours aisé, et peut être source de contestation.

Demandez la requalification des actes du défunt

Vous devez apporter au juge la preuve de ce que vous avancez, c'est-à-dire prouver que les actes effectués par le défunt de son vivant doivent être interprétés différemment.

Le juge interprète souverainement : il prend sa décision sur la base des preuves et allégations qui lui sont fournies.

Agissez en annulation d'un testament

Vous disposez d'une année à compter de la révélation du problème, quand vous constatez que le testament peut être remis en cause.

L'annulation du testament est demandée par requête adressée au tribunal judiciaire  du lieu d'ouverture de la succession, et l'assistance d'un avocat est obligatoire.

À noter : depuis le 1er septembre 2019, l’usage de la communication électronique est obligatoire devant le tribunal judiciaire (ex-TGI) en matière contentieuse pour tous les actes de procédure, à peine d’irrecevabilité relevée d’office (article 796-1 du Code de procédure civile créé par le décret n° 2017-892 du 6 mai 2017). Cette obligation concerne les avocats et le ministère public agissant comme partie principale ou partie jointe. Les avis, avertissements ou convocations sont également remis aux avocats par voie électronique.

Bon à savoir : vous n'avez aucune formalité particulière à effectuer (ni requête ni avocat) si le testament n'est pas notarié ; il suffit d'invoquer sa nullité devant le notaire.

3. Contestez l'évaluation du patrimoine du défunt

L'évaluation des biens de la succession est primordiale : c'est sur cette base que sont calculées les parts de chaque héritier. En cas de désaccord, il est possible d'agir.

Bon à savoir : vous pouvez même demander la nomination d'un expert judiciaire.

Demandez la réévaluation des biens de la succession

La difficulté d'évaluation se pose surtout pour les biens précédemment donnés par le défunt, et dont les bénéficiaires sont tenus au rapport. Ainsi, si au moment de l'acte de donation :

  • les modalités de rapport du bien donné et de sa valeur ont été prévues, l'évaluation doit se faire conformément aux prescriptions de l'acte, et aucune contestation n'est possible ;
  • aucune modalité de rapport du bien donné n'est prévue, les règles d'évaluation prévues aux articles 860 et 860-1 du Code civil doivent être appliquées.

Important : si aucun accord amiable n'est trouvé entre les héritiers, vous avez la possibilité de contester la valeur rapportée du bien.

Agissez en contestation de l'évaluation d'un patrimoine

Si aucun accord amiable n'est trouvé entre les héritiers quant à l'évaluation des biens qui doivent faire l'objet du rapport, un expert est nommé par le juge. se fondant sur les dispositions des articles 860 et 860-1 du Code civil, il évalue le bien et propose une évaluation au juge.

La succession est alors réglée de façon judiciaire.

4. Contestez la succession et les opérations de partage

Si aucun accord amiable n'est trouvé entre les indivisaires au moment du partage, il est possible de contester à la fois la succession et les opérations de partage de celle-ci.

La répartition de l'ensemble du patrimoine du défunt entre ses héritiers est établie :

  • en fonction des dispositions de dernières volontés du défunt, lequel a désigné les bénéficiaires et attributaires de ses biens ;
  • ou selon les directives des héritiers eux-mêmes, qui s'accordent amiablement sur la répartition.

Bon à savoir : la loi rappelle que les héritiers peuvent rester dans l'indivision, mais il est également possible de demander le partage de la succession.

Certains héritiers peuvent demander l'allocation d'un ou de plusieurs biens déterminés. À défaut d'accord entre les héritiers au moment de cette phase ultime du partage de la succession, vous avez la possibilité de contester cette dernière, si vous estimez que vos intérêts sont lésés.

Bon à savoir : la Cour de cassation rappelle qu'en cas de mésentente entre les héritiers majeurs et capables sur le partage des lots entre eux, ce partage doit être effectué par tirage au sort (Cass. 1e civ., 31 janvier 2018, n° 17-15.455).

À noter : un partage ne peut être annulé pour erreur que si l’erreur a porté sur l’existence ou la quotité des droits des copartageants ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable. Une évaluation erronée des biens à partager ou d’un allotissement dont la valeur est inférieure à celle à laquelle le copartageant était en droit de prétendre ouvre droit à une action en complément de part pour lésion si les conditions en sont réunies (Cass. com., 28 février 2018, n° 16-27.591).

L'action en comblement de partage

Vous pouvez agir en comblement de partage, si vous estimez que vous avez été lésé, au moment du partage, d'au moins 25 % de ce qui vous revenait.

Les juges envisagent les cas où la lésion provient d'une erreur dans l'établissement de l'actif partageable et où les biens du défunt ont été mal évalués. Elle s'apprécie au jour du partage et non à compter du décès.

Bon à savoir : ne tardez pas à agir ; l'action en comblement de partage se prescrit (écoulement d'un délai à l'expiration duquel une action judiciaire ne peut plus être exercée) par 2 ans à compter du partage.

L'action en réduction de donation-partage

Vous pouvez agir en réduction de donation-partage si vous vous estimez lésé : une atteinte est portée à votre part réservataire. Cette contestation doit être faite au décès du donateur.

Cette action se prescrit par 5 ans à compter de l'ouverture des opérations de succession, ou par 2 ans à compter du jour où vous avez eu connaissance de l'atteinte portée à votre réserve héréditaire.

L'action en nullité de donation-partage

Vous pouvez demander en justice l'annulation de la donation-partage, si vous avez été oublié lors de l'opération, ou si vous estimez que des manœuvres frauduleuses exercées par d'autres héritiers vous portent un préjudice réel et certain.

Vous avez un délai de 5 ans pour agir à compter de la conclusion de l'acte de donation-partage. Vous devez apporter la preuve au juge de votre intérêt à agir.

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